Voilà donc l’économie 2.0, le nouveau modèle du travail à l’ère de l’internet. Un taylorisme aimable, équitable, horizontal, rapide, basé sur la sagesse des foules et la suppression des intermédiaires. Quel magnifique résultat en effet: un accroissement du stress susceptible de causer des maladies mentales et physiques, une surveillance permanente des performances, des salaires au plancher, une optimisation fiscale extrême. Telles sont les conclusions de diverses enquêtes parues récemment sur les conditions de travail dans les entrepôts géants d’Amazon.
«Passer dix heures et demie par jour à collecter des objets sur des étagères revient à contempler les recoins les plus obscurs de nos désirs consuméristes», résume une journaliste de The Observer qui a passé une semaine à trimer dans un centre de distribution d’Amazon en Grande-Bretagne. Un journaliste de la BBC, lui aussi engagé dans un centre, conclut: «Nous sommes des machines, nous sommes des robots.» Amazon, par un bel acte manqué, confirme ce statut robotisé en faisant ces jours derniers la promotion béate de son futur mode de livraison par drone, trente minutes à peine après avoir reçu une commande. Très bien, mais qui prendra la défense des petits drones surmenés, exploités, eux-mêmes surveillés alors que leur fonction habituelle est celle de mouchards à hélices? Intelligence artificielle aidant, l’un d’entre eux nous écrira-t-il son calvaire quotidien?
On attend!