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Staccato: c’est cool, c’est zen, c’est propre en ordre

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Jeudi, 1 Mai, 2014 - 06:00

Si je vous dis: j’aime l’ordre. Quel effet ça vous fait? Je sais, pas terrible, me voilà profilée: Putzfrau psychorigide tendance UDC.

Si je vous dis: j’aspire au désencombrement, à une certaine maîtrise de moi dans l’esprit des sages zen, à une présence au monde purifiée dans l’ici et le maintenant. C’est mieux. Ouf, merci Dominique Loreau. Je vais pouvoir faire mon coming out.

Dominique Loreau est de ceux qui ont promu l’idéal postmoderne du less is more. Avec des slogans franchement géniaux comme «Simplifier sa vie, c’est l’enrichir» (L’art de la simplicité, Robert Laffont) ou «Jeter le superflu pour faire de l’espace en soi» (L’art de l’essentiel, Flammarion). Toutes mes copines ont adoré. Je ne sais pas si elles ont beaucoup jeté, en tout cas elles ont: 1) acheté les livres 2) et aussi des trucs blancs et des galets pour faire zen.

Mais bon, jusque-là, c’était facile. «Simplicité» et «essentiel» sont des mots désirables, nimbés d’une aura bleu ciel. Pas comme «ordre», ce vocable gris-vert, ce terme louche qui sent le cacao à l’eau et résonne de tous les péchés du XXe siècle.

Pourtant, si l’on veut vivre dans un espace allégé, on ne peut pas se contenter de jeter, on est bien obligé de mettre un minimum d’ordre et de le maintenir. C’est ce que, courageusement, Dominique Loreau explique dans son dernier livre, L’art de mettre les choses à leur place (Flammarion). Sous-titre: «Une vie meilleure dans un espace ordonné». Autant dire: quoi de neuf? Le propre en ordre.

Je souhaite le succèsà cet ouvrage. J’appartiens en effet à cette partie d’humanité qui souffre de claustrophobie dans les intérieurs à l’horizon bouché par des sommets paperassiers ou textiles. Et je ne sais pas ce qui m’agace le plus. Etre soupçonnée de psychorigidité tendance UDC dès que je manifeste mon besoin d’air. Ou sentir une massive complaisance à soi-même chez celui qui fait semblant de s’excuser pour le désordre. Tout en pensant: je laisse traîner mes chaussettes puantes, n’est-ce pas la preuve que je suis un esprit créatif et rebelle?

Ben non, ce n’est pas la preuve. C’est peut-être même l’inverse, puisque chaque fois que le bordélique se remet en quête d’un objet enseveli, il perd un peu de son «ki». Vous savez, l’énergie vitale.

Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Dominique Loreau. Ooom. 

anna.lietti@hebdo.ch

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