En Suisse alémanique, homos et lesbiennes ne font plus scandale. Aujourd’hui, un coming out ne fait plus la une des journaux. Il va de soi. Des homosexuels sont à la tête des villes de Zurich et de Bâle. Même au Palais fédéral, des homosexuels avoués comme les conseillers nationaux zurichois Hans-Peter Portmann (PLR) et Martin Naef (PS) ou l’ancien président du Conseil national Claude Janiak (PS) de Bâle-Campagne ne sont plus des marginaux. Même l’UDC comprend dans ses rangs un homo reconnu en la personne de Thomas Fuchs, député au Grand Conseil bernois.
Bien sûr, à la pause ou au bistrot,«pédé» reste une insulte vite lancée et généralement malveillante. Mais le débat pour savoir si les homos et les lesbiennes sont des gens comme vous et moi a été mené et conclu. Croyait-on. Jusqu’au moment où le conseiller national et défenseur de la famille Toni Bortoluzzi a pris la parole. Dans le magazine Beobachter, le sexagénaire a dit: «Les homos et les lesbiennes et tous ceux qui vivent seuls ou changent de partenaire au gré de leur humeur sont à côté de la plaque.» La tolérance ne devrait pas aller jusqu’à «mettre sur pied d’égalité les conduites contre nature et les comportements naturels». Le maître menuisier populaire sait même pourquoi les homosexuels sont des êtres «contre nature». Ils auraient, selon lui, «un lobe du cerveau qui marche à l’envers».
En disant cela, Toni Bortoluzzi a suscité l’indignation jusque dans les rangs de son propre parti. Même le conseiller national UDC et adversaire des minarets Walter Wobmann n’a pu que hocher la tête. «Je me demande quelle mouche l’a piqué.».Malgré tout, Toni Bortoluzzi a ouvert une brèche. La Weltwoche, magazine autrefois libéral, a promptement saisi la balle au bond et demande: «Dit-il vrai?» Et de publier sur deux pages «La vérité sur les lobes du cerveau». D’abord, elle corrige Toni Bortoluzzi: «Le grand cortex a la même apparence chez tous les êtres humains.» Mais bien qu’il émette cette bêtise nullissime, le magazine proche de l’UDC y va de ses éloges: «Pourtant, Toni Bortoluzzi a ouvert un débat intéressant: qu’y a-t-il de différent chez les homosexuels par rapport aux hétérosexuels?» C’est ainsi que la Weltwoche en arrive finalement au «test de l’annulaire» pour les homos: «Il est également bien connu que chez les hétéros – mais pas chez les homos – l’annulaire est généralement plus long que l’index.»
En Suisse romande, il y a le trafiquant de vin Dominique Giroud et son onctueux entourage de catholiques traditionalistes proches des apôtres moralisateurs d’Ecône. En Suisse alémanique, la Weltwoche parle d’un «test de l’annulaire» pour les homos à cause d’un homme qui diffame les homosexuels en les traitant d’«égarés». Peut-être que ce test recevra bientôt la bénédiction de la Fraternité de Saint Pie X d’Ecône.